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L'Union et l'Afrique subsaharienne : quel partenariat ?
Depuis le début des années 1990, l'Union poursuit un objectif ambitieux aujourd'hui défini par la Stratégie européenne de Sécurité : contribuer à un monde meilleur. La région du monde à la fois la plus pauvre et la plus sujette à la violence est celle avec laquelle le projet européen entretient une relation datant de ses origines et dont le destin a longtemps été façonné par ses Etats membres : l'Afrique subsaharienne. Parmi la panoplie des instruments au service de l'Union pour contribuer à l'objectif premier de la sécurité qu'elle s'attribue sur la scène internationale, la conjugaison de ses compétences communautaires en matière de commerce et de coopération au développement apparaissent comme de puissants leviers à même d'influer sur les facteurs économiques et politiques qui déterminent les montées de violence auxquelles se heurte le développement des sociétés africaines.
Le lien entre le développement de ces sociétés et leur sécurité est de plus en plus reconnu et il ne fait pas de doute qu'il doit encore être renforcé, car seule une politique étrangère ambitieuse est en mesure d'offrir le contexte nécessaire à la réduction de la pauvreté, et seule une politique de développement cohérente et efficace, centrée sur la réduction de la pauvreté et l'amélioration de la gouvernance, peut contribuer durablement à la sécurité de l'Afrique. L'examen de la conjugaison des instruments communautaires, réunis par l'accord de partenariat UE-ACP signé à Cotonou, révèle de nombreuses opportunités permettant de contribuer à la stabilité structurelle de l'Afrique subsaharienne.
Cet accord de partenariat repose sur deux piliers principaux, la coopération économique et commerciale et la coopération technique et financière, auxquels est venue s'adjoindre une forte dimension politique dépassant largement le cadre traditionnel de la coopération au développement. Chacune de ces trois dimensions révèle de nombreuses opportunités. Ces trois piliers permettent à l'Union de renforcer considérablement les projets d'intégration régionale, de mener un dialogue politique constructif et approfondi selon les formes, sur les sujets et à l'échelle qu'elle souhaite, mais aussi de programmer son aide de manière stratégique et efficace. Pourtant les négociations des accords de partenariat économique semblent n'être gouvernées à ce jour que par leurs dimensions commerciales et celles-ci suscitent de nombreuses inquiétudes. Le dialogue politique n'a pas trouvé à s'appliquer en tant qu'instrument positif et constructif de l'influence européenne mais semble se limiter, comme par le passé, à un examen paralysant du respect des conditionnalités. Enfin, si l'aide a pu devenir un instrument stratégique grâce aux considérables efforts menés pour simplifier les instruments et développer le cadre des Documents stratégiques pays (DSP), l'objectif affiché lors du Conseil européen de Barcelone d'une aide au développement atteignant 0,39% des PIB nationaux apparaît encore bien éloigné des objectifs du millénaire et des 0,7% définis dans le cadre des Nations unies. Si l'accord de Cotonou offre ainsi de nombreuses opportunités et répond à la majorité des faiblesses des Conventions de Lomé, il demande encore, pour se déployer avec toute l'efficacité pour laquelle il a été conçu, un engagement politique et matériel plus fort.
Ces objectifs ne sauraient par ailleurs être atteints sans que l'Union ne réponde à plusieurs des défis auxquels se heurte toujours le développement de sa capacité internationale. Ces défis nous semblent résider dans la nécessité d'un plus fort rayonnement et ainsi d'une plus grande influence de l'Union, dans la nécessité d'une cohérence dans la définition comme dans la représentation des actions de l'Union et enfin dans une plus forte coordination de l'action des Etats membres. La création tant attendue du poste de Ministre des Affaires étrangères de l'Union contribuera grandement à surmonter ces trois défis. Mais la plus-value de la nature inter-institutionnelle de sa mission ne saurait porter tous ses fruits sans être efficacement transposée dans l'action et la représentation de l'Union sur le terrain. Nous explorerons à cette fin la voie d'une représentation politique permanente de l'Union en Afrique, qui procéderait d'une fusion des compétences d'un envoyé spécial du Haut Représentant et d'un chef de délégation de la Commission. Si l'Union ne semble pas avoir les moyens de développer les capacités nécessaires à l'échelle nationale, pourtant les seules à même de se mesurer aux défis du développement et de la stabilité de l'Afrique, nous explorerons l'opportunité d'une représentation de cette nature à l'échelle de la région qui aurait vocation à structurer l'action de l'ensemble des délégations sous sa coupe. Cette solution nous semble à même de contribuer efficacement à une utilisation optimale des opportunités de l'accord de Cotonou mais aussi de relever les défis de la capacité européenne, qui peuvent toujours se résumer à la règle dite des trois C - coordination, complémentarité, cohérence - à laquelle il conviendrait sans conteste d'ajouter, d'un point de vue politique, le rayonnement.