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Les conflits soudanais à l'horizon 2011 : scénarios
Depuis son indépendance en 1955, le Soudan a été presque continuellement le théâtre de conflits sanglants. Si les événements du Darfour ont focalisé l’attention, le sud du pays est également un lieu de tensions entre le gouvernement de Khartoum et le Mouvement populaire de Libération du Soudan (MPLS). Certaines similitudes quant à l’origine des affrontements nous ont conduits à établir une corrélation entre ces deux zones. Ce lien est inscrit dans les trois scénarios proposés concernant l’évolution possible des conflits soudanais à l’horizon 2011, date du référendum d’autodétermination prévu au Sud-Soudan. Les neuf variables mises en relief constituent une base de réflexion pour chacun de ces scénarios. De la répartition du pouvoir à l’échelle nationale à l’attitude des acteurs internationaux, en passant par l’enjeu d’Abyei, leurs modifications détermineront en effet l’évolution générale du pays. Le développement le plus crédible est celui d’une poursuite des violences, qui demeurent malgré tout circonscrites au Darfour seulement. Dans un tel contexte, le pouvoir central ne réussit pas à pacifier la région, mais n’est pas déstabilisé par des rebelles manquant singulièrement d’unité. L’impasse politique est également perceptible en ce qui concerne les accords de paix, qui restent inchangés en dépit de la farouche opposition des rebelles darfouris. Même les élections régionales et nationales, qui se déroulent, après un probable report, dans un climat de violences et de suspicions, ne permettent pas de pacifier les antagonismes. Dès lors, la situation humanitaire reste des plus précaires et les camps de déplacés parsèment le Darfour. Bénéficiant d’une meilleure répartition de la manne pétrolière, le sud du pays aborde plus sereinement le virage vers sa probable indépendance. Modernisant son armée dans l’optique d’une possible confrontation avec le Nord, le MPLS ferme pour l’instant les yeux sur les manquements du parti au pouvoir à la fois au Darfour et dans la mise en application de l’Accord de paix global (CPA). L’accalmie profite à la population civile et les réfugiés du Sud continuent de regagner une zone relativement pacifiée. Cette pacification est néanmoins susceptible de ne pas résister à la partition du pays. Si le référendum au Darfour ne représente pas une réelle opportunité pour ses habitants, celui devant se dérouler au Sud-Soudan accordera selon toute vraisemblance l’indépendance à la région. Dans l’attente de la réaction du Parti du congrès national (PCN), le principal point de discorde est l’enclave d’Abyei, territoire aussi symbolique que stratégique faisant l’objet d’une lutte par procuration entre Juba et Khartoum. La communauté internationale aborde quant à elle la question soudanaise de manière divisée, au mieux en évitant de s’impliquer massivement dans les opérations de maintien de la paix, au pire en contribuant à l’exacerbation des tensions. Parmi les scénarios envisagés, c’est le plus probable, celui d’un embrasement généralisé avant l’échéance de 2011, qui a été développé ici. Dans ce cas de figure, le PCN, affaibli, ne peut maintenir son autorité sur un Darfour qui s’enfonce dans les luttes interethniques. Le MPLS profite de l’aubaine pour accélérer le processus d’indépendance, et tente par la même occasion de rattacher les territoires frontaliers à la nouvelle entité. Le verdict des urnes importe peu dans un pays qui sombre dans le chaos et pour lequel la communauté internationale, impuissante et passive, n’est d’aucun secours. Dans le dernier scénario, en revanche, les mécanismes d’une hypothétique sortie de crise s’articulent autour d’une ouverture du régime afin de permettre aux rebelles de retourner à la table des négociations et de jouer le jeu des élections. Portée par la volonté renouvelée de quelques acteurs internationaux, cette ouverture stratégique, censée faire bénéficier le PCN d’une légitimité accrue, s’accompagnerait d’une amélioration de la situation humanitaire, sans pour autant empêcher la partition du pays en 2011. Confrontée à l’indépendance du Sud, il est dès lors peu probable que la phase d’apaisement survive à cette échéance.