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Le « printemps des peuples »

10 February 2011
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Les événements qui viennent de se produire en Tunisie, puis en Égypte, avec leurs spécificités, font apparaître, de manière indubitable, un phénomène lourd de conséquences : la sous-estimation de l’autonomie du peuple.

Durant des décennies, on a peu à peu fait disparaître une réflexion sérieuse sur la réalité de ce qu’étaient les peuples du monde arabe en leur substituant une vision caricaturale et réductrice.

Schématiquement, la quasi totalité des « experts », des diplomates, des « observateurs » distinguaient une minorité démocratique, en général formée à l’occidentale, destinée soit à se taire soit à souffrir des exactions des pouvoirs en place (minorité peu soutenue, car réputée non susceptible de peser sur l’avenir de ces États et encore moins d’être une alternative crédible aux dictatures en place), une masse plus ou moins amorphe sans conscience politique, susceptible de se révolter dans des « émeutes de la faim » (multitude indéterminée conçue, avant tout, comme des « ventres » plus ou moins affamés), mais guère plus. Aussi, suffisait-il de lui donner du pain pour ramener le calme, après la neutralisation des « meneurs », nécessairement « manipulés ». L’insécurité était, en ce qui concerne cette « masse », avant tout perçue comme « alimentaire ». Enfin, une partie dangereuse de la population, plus ou moins clandestine selon les pays, au nom générique d’islamistes (fanatiques par définition, ils étaient la main invisible qu’il fallait couper pour l’empêcher d’inciter les sociétés à se révolter).